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samedi 29 août 2009

Comment trouver la bonne place pour l'animateur de débat

Difficile de trouver une bonne place pour animer le débat. Quel que soit le public, quel que soit la raison, il n'est pas possible de poser des questions sans oublier sa neutralité. C'est une vieille question traitée dans les manuels de sociologie sur la manière de conduire des entretiens. Empathie ou pas empathie. Ne faire que poser des questions ou pas. Etc. On retrouve aussi ce problème avec les débats "participatifs".

À l'écoute d'une conférence dans le cadre de la formation pour le réseau La main à la pâte, je vois que ce sont les mêmes questions qui reviennent. Ici il est question d'animer des débats philosophiques à l'école primaire ou au collège. Quelle place pour le professeur ? Isabelle Millon et Gabriel Viallet apportent leurs réponses à partir de la méthode d'Oscar Brenifier.

Le professeur doit mener le débat avec rigueur pour amener les enfants à penser par soi même, de "penser la pensée".

Pour Isabelle Millon, l'animateur "n'intervient pas" sur le sujet, qu'il soit d'accord ou pas. On évite les "moi aussi, je voulais dire la même chose", les accords superficiels qui n'apportent aucune idée supplémentaire. Si on croit vouloir dire la même chose, on s'essaye à reformuler et ce sont les autres qui diront si nous avons réellement dit la même chose.

Les différents travers.

Comme le professeur organise sa classe, un intervenant apporte la contradiction sur l'hypothèse de la neutralité. "C'est lui qui décide qu'on va passer à un autre sujet." "Donner 5 mn pour une question n'est pas neutre parce que vous avez estimé que 5 mn suffisait." Isabelle Millon précise qu'il ne doit pas dire son opinion, son accord ou son désaccord sans revenir sur la question stratégique de la gestion de la montre.

En cas de "dérapage", l'adulte va demander aux petits camarades de "Attention tu as dit ça, tu peux justifier ce que tu as dit ?" puis ensuite de demander l'avis des camarades. Alors le contradicteur doute de la neutralité s'il faut penser à faire justifier l'enfant quand on est d'accord. Isabelle Millon rétorque que demander la justification doit être fait systématiquement (elle n'est pas ethnométhodologue...).

Un autre participant revient sur le fait que des questions, des positions de fond ne peuvent pas être tranchées par un débat, notamment quand il y a une part de vécu. Isabelle Millon revient sur une expérience qu'elle a eu lors d'un débat sur "est-ce que les parents ont le droit de taper leur enfant ?" et répond un peu à côté sur le fait que ces débats peuvent effectivement faire émerger des choses douloureuses. L'extérioriser permet de réfléchir, de mieux respecter l'avis des autres si on veut que les autres respectent mon avis, même si "ça ne résout pas tous les problèmes".

Stopper le débat pour des raisons d'horaires, négocier l'ordre du jour, autant de petits pouvoirs de l'animateur. Selon les auteurs, le prof ne fournit rien de lui-même, une sorte de tabula rasa auquel je ne crois guère moi non plus. Quand on cherche à mettre tout le monde à l'aise pour faciliter la parole, on favorise toujours une position plutôt qu'une autre. Toutes les relances ("je n'ai pas très bien compris ce dernier point", "qu'est-ce que tu entends par là ?",...) ne peuvent être systématiques et démontrent telle expression comme "pris-comme-allant-de-soi". D'où l'intérêt pour le professeur de co-animer le débat avec un élève qui change à chaque fois.

Parce que savoir questionner est aussi important que répondre.

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